Régionales. Pour une éducation égalitaire !

La Région est amenée à tenir « une place éminente relative à la formation professionnelle, à l’emploi, à la démocratie sociale » (loi du 5 mars 2014). Son rôle n’est donc pas limité à des investissements matériels comme la construction des lycées, la préservation du patri/matrimoine, mais aussi à une « élaboration stratégique » en matière de service public lié à la formation, l’orientation, l’emploi.
La lutte  pour l’égalité entre femmes et hommes y trouve donc toute sa place.

 

Les inégalités persistantes entre les femmes et les hommes trouvent en grande partie leurs racines dans les préjugés entretenus, sciemment ou non, par les parents et le milieu scolaire. C’est dès l’enfance que les stéréotypes s’installent et qu’une image amoindrie des femmes se dessine. Si la Région ne peut pas intervenir à toutes les étapes de la construction sociale des futur-e-s citoyen-e-s, elle a un rôle à jouer en matière d’éducation puisque la formation professionnelle et la gestion des lycées font partie de ses compétences.

 

Des manuels scolaires toujours sexistes

Dès 1979, la Convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination envers les femmes demandait d’éliminer « toute conception stéréotypée des rôles de l’homme et de la femme à tous les niveaux et dans toutes formes d’enseignement ». En France, on en est encore loin ! Depuis le premier texte officiel du 12 juillet 1982 intitulé « Action éducative contre les préjugés sexistes », le contenu des manuels a un peu évolué avec notamment l’apparition dans les livres d’histoire de figures féminines « oubliées » et la place nouvelle donnée aux thématiques féministes, mais des représentations sournoises, d’autant plus difficiles à débusquer qu’elles sont intériorisées, demeurent.

L’étude de 2012 de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (la HALDE, aujourd’hui Défenseur des droits) portant sur toutes les disciplines du collège et du lycée, avec une attention plus particulière concernant les manuels d’éducation civique, déplore que « l’image des femmes et des hommes continue de connaître un traitement différencié : les hommes sont plus souvent représentés que les femmes. Sur l’ensemble des illustrations étudiées qui incarnent le milieu professionnel, 1 046 présentent des hommes, 341 des femmes. La place des femmes est encore fortement marquée dans la sphère domestique où leur rôle est réduit à celui de mère et d’épouse. Elles sont peu représentées dans les sphères économique et politique ».

Un exemple parmi tant d’autres d’un traitement différencié des femmes et des hommes : dans un manuel de français pour élèves de seconde, la notice biographique consacrée à Simone de Beauvoir précise qu’elle fut la compagne de Jean Paul Sartre, mais celle de Jean-Paul Sartre ne précise pas qu’il fut le compagnon de Beauvoir !

Les manuels scolaires peuvent devenir des outils de transformation sociale. Encore faut-il une réelle volonté politique et des moyens pour y parvenir.

 

Un parcours différencié : l’orientation en question

Ni les filles, ni les garçons, ne sont meilleur-e-s élèves par nature, mais leurs modes de vie, leur éducation, les choix de leurs parents ou le fonctionnement du système éducatif restent différenciés selon le sexe. Ces réalités expliquent la plus ou moins grande réussite scolaire dans certains domaines, et surtout, les choix d’orientation vers telle ou telle filière.

Si, en classe de troisième, le choix entre la seconde générale et la seconde professionnelle semble davantage dépendre des résultats scolaires obtenus et du milieu social, les choix se révèlent fortement sexués en fin de seconde dans l’une et l’autre filière. Il faut dire que les stéréotypes liés aux métiers ont la vie dure : il n’a échappé à personne qu’il est peu commun pour un garçon de devenir auxiliaire de puériculture et pour une fille plombière. L’intériorisation des stéréotypes dans le choix de la formation et de l’emploi sont toujours déterminants : les secteurs du sanitaire et du social, de l’enseignement, de la bureautique restent assimilés au« féminin » et par ailleurs, les filles considèrent les métiers dits « masculins » comme contraires à leur aspiration d’épanouissement. Elles craignent de perdre leur « féminité », redoutent le regard des hommes qui les entourent (peur du machisme des employeurs et du milieu professionnel), hésitent à embrasser des carrières qui laisseraient peu de place à la vie familiale. Les travaux sociologiques sur l’orientation parlent ainsi de « choix de compromis » pour désigner la tendance qu’auraient les filles, plus que les garçons, à limiter leurs ambitions scolaires et professionnelles pour se diriger vers des métiers qui leur semblent faciles à concilier avec leurs futurs rôles familiaux.

Ces choix d’orientation scolaire se répercutent directement sur les carrières professionnelles (voir l’article sur les inégalités professionnelles ICI)

 

Des véhicules d’apprentissage peu féminisés

– Les lieux d’enseignement

Il n’est pas anodin que le langage courant qualifie de « maternelles » les écoles de la petite enfance… et quand on passe en revue les noms des lycées de la région, on s’aperçoit qu’ils sont nombreux à se référer à de « grands hommes » mais que les femmes sont terriblement absentes des frontons de ces établissements d’enseignement secondaire. Combien de lycées « Jean Moulin » ou « Jules Ferry », pour si peu de « Geneviève de Gaulle-Anthonioz » et de « Marie-Curie » ?

– La langue

La langue est le véhicule de l’apprentissage : son sexisme contribue à entretenir des représentations différenciées. Il n’est lui-même que la résultante de discriminations inscrites dans les habitudes, d’inégalités acceptées plus ou moins consciemment et ce au sein même de notre système éducatif : le masculin devrait-il  toujours « l’emporter sur le féminin » en grammaire comme dans la vie quotidienne ? « le genre masculin » serait-il au 21ème siècle  « réputé plus noble à cause de la supériorité du mâle sur la femelle » ? (Nicolas Beauzée, grammairien, 1767).

 

Face à ce constat, nous devons agir sur le plan de l’éducation afin de briser les stéréotypes en intégrant dans les heures de cours des interventions d’associations féministes, des formations du personnel des lycées (professeur-e-s, conseillèr-e-s d’orientention, CPE, surveillant-e-s….), afin de permettre à chacune et chacun de s’épanouir dans ce qui lui plait, et non en se soumettant aux carcans qui perpétuent des traits de caractère et des goûts différenciés, et amènent donc, au bout du chemin, à assumer des tâches et des emplois également différenciés.

 

 

C’est pourquoi, afin de proposer une réelle éducation égalitaire entre les femmes et les hommes, nous défendrons à la Région :

 

Un service public d’orientation régional qui mettra en œuvre par des interventions, suivies dans le temps, une politique visant à décloisonner les emplois, à inciter à la mixité dans l’orientation et la réinsertion professionnelle.

Au niveau des établissements éducatifs de sa compétence, un soutien aux initiatives de la communauté éducative (personnels, élèves)  dans les projets  visant à la promotion de l’égalité entre garçon et filles : projets d’établissements, etc…

Des campagnes de sensibilisation contre les préjugés sexistes favorisant une orientation non sexuée vers les métiers, en lien avec les conseillers et conseillères d’orientation psychologues dans les lycées

– Un soutien financier, avec des subventions conséquentes, aux interventions d’associations œuvrant à l’égalité femme / homme  sur le territoire.

Des subventions et la promotion d’actions de formation continue visant à lutter contre les discriminations femmes-hommes

La formation des agents régionaux à tous les niveaux hiérarchiques à la prise en compte des stéréotypes de genre et des discriminations sexistes afin de les faire disparaître

 

La Région, institution territoriale, éducative par sa mission est un reflet de la société ; faisons qu’elle ne soit pas le miroir déformant, hideux du machisme et que par sa politique, elle porte le visage de l’égalité entre femmes et hommes !

 

 

 

Documents de référence :

  • « Manuels scolaires et stéréotypes sexués : éclairage de la situation en 2012 »

http://www.cemea.be/manuels-scolaires-et-stereotypes

  • Étude de la HALDE : « La place des stéréotypes et des discriminations dans les manuels scolaires »

http://halde.defenseurdesdroits.fr/IMG/pdf/DP_manuels_scolaires_VF.pdf

  • Rapport du Sénat : « Lutter contre les stéréotypes sexistes dans les manuels scolaires : faire de l’école un creuset de l’égalité »

http://www.senat.fr/rap/r13-645/r13-645.html

  • Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Céreq) : « Les femmes et les carrières scientifiques »

http://www.cereq.fr/articles/Focus/La-faible-orientation-des-filles-vers-les-carrieres-scientifiques

  • Observatoire des inégalités : « Filles et garçons dans l’enseignement supérieur : des parcours différenciés »

http://www.inegalites.fr/spip.php?article1096&id_mot=124

  • OCDE : « Les inégalités entre filles et garçons dans l’enfance influencent l’orientation professionnelle et les perspectives d’emploi »

http://www.oecd.org/fr/education/les-inegalites-entre-filles-et-garcons-dans-l-enfance-influencent-l-orientation-professionnelle-et-les-perspectives-d-emploi.htm

 

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